En dépit d’une importante mobilisation associative et citoyenne, le Ministère de la Transition écologique avait publié le 4 août 2023 l’arrêté triennal fixant pour 3 ans (2023-2026) la liste des espèces susceptibles d’occasionner des dégâts (ESOD) dans chaque département français : la martre des pins, la belette d’Europe, la fouine, le renard roux, la pie bavarde, le geai des chênes, la corneille noire, le corbeau freux et l’étourneau sansonnet. Selon un tableau de répartition géographique annexé à l’arrêté, chacune de ces espèces est classée ESOD à l’échelle d’un département ou sur un nombre limité de communes ou de cantons, où elle peut être tuée quasiment toute l’année en quantité illimitée.
Dénonçant un inacceptable massacre, la LPO avait déposé un recours juridique devant le Conseil d’Etat, ainsi que l'ASPAS, One Voice, FNE, Humanité & Biodiversité et Animal Cross. La plus haute juridiction administrative française vient aujourd’hui de rendre sa décision suite à l'audience du 31 mars 2025.
Au total, sont déclassés :
- La martre dans les 26 départements où elle était considérée ESOD. S'agissant d'une espèce inscrite à l'annexe V de la Directive habitat, les prélèvements doivent être compatibles avec son maintien dans un état de conservation favorable, au regard de données de surveillance que le Ministère de la transition écologique n'a pas été en mesure de fournir.
- La fouine dans l’Aveyron, le Morbihan et le Territoire de Belfort
- Le renard dans l’Aveyron, la Haute-Loire et la Lozère en dehors des zones où il est susceptible d’occasionner des dégâts.
- Le corbeau freux dans le Nord et le Pas-de-Calais
- La corneille noire dans les Alpes-de-Haute-Provence, les Hautes-Alpes, l’Aveyron, les Bouches-du-Rhône, la Haute-Loire et le Vaucluse
- La pie bavarde dans l’Ariège, la Charente, la Haute-Garonne, le Gers, le Maine-et-Loire, la Somme et l’Essonne
- L’étourneau sansonnet en Corrèze, Meurthe-et-Moselle et dans la Meuse.
Le Conseil d’Etat (CE) annule également le déterrage du renard décidé par le Ministère à l'insu des préfets dans les Alpes-de-Haute-Provence, les Alpes-Maritimes, de l’Aude, les Bouches-du-Rhône, le Finistère, le Gard, le Jura, la Loire, le Bas-Rhin, le Territoire de Belfort et le Val-d’Oise.
Néanmoins, la belette demeure encore et toujours classée ESOD dans le seul département du Pas-de-Calais, fief du président de la Fédération nationale des chasseurs, en raison de sa prétendue abondance et des risques qu'elle ferait peser sur les activités agricoles…
Cette décision intervient alors que les préfectures vont prochainement préparer leurs demandes de classement ESOD pour la période 2026-2029 lors des Commissions départementales de la chasse et de la faune sauvage (CDCFS). Le prochain arrêté triennal devra désormais tenir compte de cet arrêt du Conseil d’Etat et des derniers travaux scientifiques, notamment les rapports très critiques de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et de l’Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD) publiés respectivement en septembre 2023 et en février 2025. La Stratégie nationale pour la biodiversité 2030 dévoilée le 20 juillet 2023 doit également faire évoluer les modes de gestion des ESOD, notamment par le biais d'un premier travail sur les mustélidés et le renard dès 2026, élargi aux oiseaux en 2029.
La destruction systématique d’animaux sauvages visant à limiter leurs impacts sur nos activités humaines est à la fois injuste et inefficace. Alors que la biodiversité connait un effondrement dramatique, il n’est pas acceptable de perpétuer ce massacre inutile. La science et le droit ont tranché dans le bon sens.