Malgré quelques avancées, la future politique agricole française ne sera pas à la hauteur des enjeux

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Après 4 années de négociations, les derniers arbitrages du Plan Stratégique National de la Politique Agricole Commune viennent d’être annoncés par le Ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, en vue d’être soumis à la Commission Européenne. Non sans mal, quelques avancées environnementales de dernière minute ont permis notamment de renforcer la valorisation des haies et de l’agriculture biologique dans nos campagnes. Ces petites victoires restent toutefois à nuancer : le cap général donné à la politique agricole de la France demeure largement insuffisant pour répondre aux enjeux biodiversité et climat.

Les organisations de protection de l’environnement le reconnaissent : le dialogue avec le Ministère de l’agriculture s’est apaisé depuis que Marc Fesneau a succédé à Julien Denormandie. Cette meilleure écoute de l’exécutif est malheureusement trop tardive, et n'a pas suffit à contrebalancer les arbitrages déjà entérinés lors de la phase d’élaboration de la première version du Plan Stratégique National (PSN), déclinaison française de la Politique Agricole Commune de l’Union Européenne.

Parmi les points positifs : la comptabilisation des haies dans les règles de la conditionnalité de la PAC qui constitue un compromis acceptable à même d’inciter les agriculteurs à conserver leurs haies, habitats vitaux pour de nombreuses espèces animales. A cela s’ajoute une avancée importante pour la LPO : la prolongation d’un mois de la période d’interdiction de la taille des haies, qui s’étendra désormais du 16 Mars au 15 Août afin de permettre à la faune de mieux se reproduire en paix !

L’agriculture biologique sera quant à elle mieux valorisée que ce qui était prévu dans la première copie du PSN remise à la Commission européenne fin Décembre 2021, faisant ainsi l’objet d’une majoration de 30 euros par hectare par rapport à la certification Haute Valeur Environnementale (HVE), dont le cahier des charges demeure très insuffisant.

Bien que la France ait abandonné l’idée de déroger à l’obligation de rotation des cultures imposée par le règlement européen, elle continue de défendre une dérogation pour la monoculture de maïs, symbole d’un modèle agricole productiviste à bout de souffle. Cette concession faite à la FNSEA, syndicat majoritaire des exploitants agricoles qui bataille pour la préservation des systèmes les moins résilients, n’est toutefois à ce jour pas validée par la Commission européenne.

La déception est également de mise concernant le mécanisme de rémunération de la diversification des cultures, qui concerne d’ores et déjà la très grande majorité des fermes françaises sans qu’elles n’aient à faire évoluer leurs pratiques.

En matière sociale, la France n’est malheureusement pas revenue sur ses décisions en matière de répartition équitable des aides. On peut néanmoins se réjouir des annonces relatives à l’application de la transparence GAEC pour le paiement forfaitaire à destination des jeunes agriculteurs, au non-cumul entre une retraite à taux plein et les aides PAC et à l’absence de modification du système de prorata pour la comptabilisation des surfaces pastorales.

Ce plan-là ne sera pas en mesure d’atteindre les objectifs prévus par le Pacte vert européen ou la Stratégie Nationale Bas Carbone, ni d’assurer la résilience de l’agriculture française face aux bouleversements géopolitiques et économiques, ni d’opérer les changements nécessaires à la préservation de la biodiversité, des ressources naturelles et du climat. C’est pourquoi la LPO et ses partenaires réunis au sein du collectif Pour une autre PAC poursuivront leur plaidoyer en faveur de l’évolution du PSN au travers de ses révisions annuelles et invitent les autorités françaises à maintenir un dialogue rapproché avec l’ensemble des parties prenantes pour préparer le plus en amont possible ces améliorations en cours de programmation.