Sans néonicotinoïdes, les oiseaux reviennent à la campagne

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Une étude scientifique inédite montre qu’à peine quatre ans après l’interdiction des néonicotinoïdes en France, les oiseaux sont déjà plus nombreux en milieu rural.

Entre 2013 et 2022, l’évolution des populations de 57 espèces d’oiseaux a été suivie sur près de 2000 sites agricoles en France par une équipe de chercheurs français et allemands de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), du Centre d'écologie et des sciences de la conservation (CESCO) du Muséum national d’Histoire naturelle, et de l’Université technique de Rhénanie-Palatinat (RPTU).

Les résultats de leurs travaux, publiés le 15 novembre 2025 dans la revue scientifique Environmental Pollution, sont encourageants: après seulement quatre années sans imidaclopride, le néonicotinoïde le plus utilisé en France dans les insecticides agricoles entre son apparition au début des années 1990 jusqu’à son interdiction en 2018, l’écart d’abondance des oiseaux entre les parcelles traitées et non traitées s’est réduit de 3,6 points (de –12,7 % à –9,1 %), ce qui suggère une récupération partielle des populations dans les zones les plus exposées.

La LPO a cofinancé la réalisation de cette analyse, effectuée en totale indépendance par les chercheurs, afin de disposer d’éléments scientifiques permettant d’évaluer l’impact des pesticides, et plus particulièrement des néonicotinoïdes, dans l’effondrement des populations d’oiseaux inféodés aux milieux agricoles. Une étude continentale publiée en 2023 dans PNAS a en effet mis en évidence que l’avifaune rurale avait perdu près de 60% de ses effectifs en Europe en à peine 40 ans, suggérant un lien de causalité avec l’intensification des pratiques et l’usage massif de produits phytosanitaires, que le redressement aujourd’hui constaté tend à confirmer.

Rendez-vous au tribunal

Heureux hasard du calendrier : deux jours avant la publication de cette étude, la Cour de cassation a confirmé la validité de l’action engagée en mai 2021 par la LPO et Intérêt à agir contre les sociétés Bayer, Nufarm, Fertichem, Agri Canigou, Saga et Gritche. L'objectif est d’obtenir la reconnaissance et la réparation du préjudice écologique résultant de la production et la distribution par ces industriels de produits à base d’imidaclopride pendant plus de 25 ans. Désormais, la justice devra prochainement se prononcer sur leur responsabilité dans l’effondrement des populations d’oiseaux.

Duplomb dans le viseur

En parallèle, le débat politique reste vif : à la suite de l’impressionnante mobilisation citoyenne de juillet dernier, la loi Duplomb, qui cherchait notamment à réintroduire l’usage de néonicotinoïdes en agriculture, a été partiellement censurée par le Conseil Constitutionnel le 7 août dernier. Une proposition de loi visant à abroger l’intégralité de ce texte, et également interdire l’importation en France de produits agricoles et denrées alimentaires contenant des néonicotinoïdes, doit être débattue à l’Assemblée nationale le 27 novembre prochain.