Bassin du Clain : qui veut doubler les prélèvements d’irrigation en été ?
Une consultation publique de la préfecture de la Vienne propose aux citoyens de donner leur avis sur un projet de renouvellement de l’autorisation unique pluriannuelle de prélèvement d’eau pour l’irrigation agricole qui prévoit l’augmentation significative des volumes prélevables en été dans le bassin du Clain. Une hausse majeure, injustifiée et en total désaccord avec l’étude scientifique menée sur le bassin qui recommande un seuil de prélèvement bien inférieur…
Comment participer ?
Le public peut envoyer son argumentaire pour défendre la ressource en eau en écrivant à l’adresse : [email protected]. La LPO vous invite à vous opposer au projet en mentionnant les points suivants (plus de détails ci-dessous) :
- des volumes prélevables surdimensionnés,
- une non-prise en compte des résultats de l'étude scientifique HMUC,
- un projet d'arrêté qui hypothèque les chances d'un retour au bon état des masses d'eau du Clain, prévu pour 2027.
Autoriser à prélever plus que la ressource ne peut supporter
Passer de 13 à 22 millions de m3, ce n’est pas vraiment doubler mais nous n’en sommes pas loin...
13 millions, c’est le volume prélevable en été pour l’irrigation, fixé par l’étude scientifique HMUC (Hydrologie, Milieux, Usages, Climat), au regard des capacités locales de la ressource en eau. Ce volume a été validé en juin 2023 par la Commission locale de l’eau.
22 millions par an, en été, c’est ce que voudrait le préfet de la Vienne pour une durée de 8 ans, avec une révision possible mais on ne sait pas quand.
Ce projet d’arrêté du préfet a été discrètement mis en consultation publique jusqu’au 16 mai à minuit. Depuis 2012, les irrigants avaient droit à 18 millions et ils les ont respectés. En effet, ils n’ont consommé en moyenne les 5 dernières années que 14 millions. Rien ne justifie donc la hausse des volumes pouvant être captés à 22 millions de m3 : la ressource disponible est incapable de les fournir, sans dégâts majeurs sur le débit d’étiage des cours d’eau et les nappes qui les alimentent. Il faut appliquer les résultats incontestables d’HMUC, nous avons déjà 2 ans de retard. Nier les connaissances scientifiques ne remettra pas d’eau dans les nappes !
L’autre grand perdant de ce projet, c’est l’eau potable. L’augmentation globale des prélèvements en été la met déjà en danger, mais s’ajoute également une augmentation des prélèvements dans les nappes profondes que la loi, le Schéma directeur Loire Bretagne, réserve pourtant à l’eau potable : 4 millions de m3 seraient ainsi prélevés pour l’irrigation, au lieu de 3,3 millions. C’est une augmentation notable alors que tout plaide pour une diminution urgente : pollution chronique des eaux superficielles et baisse de débit de captages comme ceux de Fleury, Cuhon, etc. Il faut planifier un abandon rapide des pompages agricoles dans les nappes profondes.
Consultation plutôt qu’enquête publique, il y a un hic !
La préfecture a préféré soustraire ces choix indéfendables à l’épreuve de l’enquête publique, au prétexte que la précédente autorisation de prélèvement avait fait l’objet d’une enquête il y a 8 ans et que cette nouvelle autorisation ne ferait que « renouveler » l’ancienne. Donc pas d’enquête. Cette fiction d’un renouvellement est invraisemblable : ce projet est très différent de celui de 2017 : 10,5 millions de volumes dits « provisoires » en été, autorisés illégalement précédemment, ont disparu : ils étaient accordés aux privilégiés embarqués dans des projets de méga-bassines. On en retrouve 4 millions sous forme d’augmentation des prélèvements légaux d’été, et le reste en hiver : 6,6 millions de m3 pour remplir des bassines… qui n’existent pas. Ce n’est plus le même projet. Les citoyens ont droit à une véritable enquête.
Dernier moyen d’augmenter les pompages d’irrigation : la préfecture « oublie » de préciser dans son projet que les 6,6 millions de m3 nouvellement autorisés en hiver pour remplir des réserves dites « de substitution » devraient venir en déduction des volumes prélevables autorisés en été. C’est le principe de la substitution : on pompe par anticipation en hiver des volumes qu’on ne pompera pas l’été suivant. L’État doit là-dessus respecter les règles qu’il a lui-même établies afin de soulager les milieux.
Vous pouvez retrouver tous les détails sur la page de la consultation publique.