Balbuzard pêcheur

Conseil Biodiversité

On compte quatre sous-espèces : la sous-espèce haliaetus, que l'on retrouve en France, se reproduit dans tout le Paléarctique et hiverne en Afrique, aux Philippines et en Indonésie ; la sous-espèce carolinensis se reproduit en Amérique du Nord et migre en Amérique centrale et du Sud ; la sous-espèce ridgwagi est sédentaire et niche au Yucatan, au Bélize et aux Caraïbes ; la sous espèce cristatus qui se rencontre en Australie et dans les archipesl du Pacifique sud, dont la Nouvelle Calédonie.

Balbuzard pêcheur © Olivier Simon

 

Description

Envergure : 145 -170 cm

Longueur : 50-60 cm

Poids : entre 1,2 et 2 kg, la femelle étant plus imposante que le mâle

Dimorphisme sexuel : Hormis la différence de poids, la femelle possède généralement un plastron d'une coloration plus foncée que le mâle chez qui il est absent ou peu marqué.

Voix : Le Balbuzard se fait très peu entendre et seulement en période de nidification

Durée de vie : La survie des balbuzards adultes est estimée à une vingtaine d’années. Mais environ 50 % des jeunes meurent dans leur première année.

Alimentation : Le Balbuzard pêcheur porte bien son nom puisqu’il ne consomme que du poisson. Il pêche en eaux profondes et en mer, dans des eaux claires où les pissons sont plus facilement visibles. il capture les proies nageant à la surface après les avoir repérées en vol ou depuis un perchoir. La ration quotidienne d'un individu a été estimée à environ 400g de poisson frais.

Comportement et territorialité : Le Balbuzard est un oiseau semi-colonial; les couples peuvent nicher en colonies lâches avec des nids séparés de quelques centaines de mètres. Le Balbuzard pêcheur a un comportement philopatrique très marqué, les jeunes ont tendance à revenir là où ils sont nés pour se reproduire, ce qui limite les capacités de dispersion de l'espèce. Les mâles sont encore plus attachés à leur lieu de naissance que les femelles qui peuvent parfois être attirées par des mâles sur d'autres territoires à plusieurs dizaines, voire centaines de kilomètres de leur site de naissance. Les balbuzards défendent leur site de nidification mais le territoire de pêche n'est en général pas défendu.

A gauche : balbuzard adulte © L.M. Préau, à droite : jeune © P. Marcellot

Identification : C’est un rapace assez grand, au corps élancé et aux ailes longues et fines. Le dos et les ailes sont brun foncé chez l’adulte, et contrastent avec le ventre blanc.  Les parties inférieures sont blanches avec une tache sombre au poignet et une barre brune sous l’aile. Sa queue est courte et carrée, sa tête est fine et proéminente, blanche avec un masque noir et des yeux jaunes. Le bec crochu est long, noirâtre, et gris-bleu à la base. Les pattes sont gris-bleu .Les juvéniles se distinguent des adultes par le motif écailleux sur le dos (lisérés clairs des couvertures sus-ailaires) qui disparait au cours de la mue du deuxième automne. Comme la femelle, ils portent également un large collier brun-gris ou roux.

Aucun caractère morphométrique particulier ne distingue les populations corse et continentale. Si elles appartiennent bien à la même sous-espèce (Pandion haliaetus haliaetus) unique en Europe, la population méditerranéene et la population continentale sont différentes aux niveaux des gènes nucléaires et les échanges d'individus entre elles sont limités (Monti et al., 2015). De plus, les populations du nord et du sud de l'Europe ont de comportements migratoires différents. Tandis que les balbuzards du nord de l’Europeet effectuent de longs trajets migratoires pour atteindre leur site d'hivernage, les populations régionales de Méditerranée ont des comportements plus diversifiés : certains sont sédentaires et restent à proximité des sites de nidification, d'autres effectuent des trajets plus ou moins courts pour atteindre des sites d'hivernage situés dans le bassin méditerranéen.

 

Distribution

Répartition mondiale du Balbuzard pêcheur

Cosmopolite, le Balbuzard pêcheur est l'un des rares rapaces présents sur tous les continents, sauf en Antarctique. La répartition du Balbuzard pêcheur au niveau mondial concerne les régions boréales et tempérées de l’hémisphère nord, l’Amérique centrale, une grande partie de l'Asie jusqu'à l'Océan Pacifique et les côtes de l’Australie.

En Europe, les populations les plus importantes se situent en Suède, en Russie et en Finlance avec plusieurs milliers de couples. Il est aussi présent en Allemagne, Norvège, Grande-Bretagne, dans les Balkans et sur certaines îles de Méditerranée (Baléares, Corse). En Afrique, la population est composée de jeunes et d’adultes hivernants.

En France, il existe deux noyaux de populations.
Le premier noyau historique est situé sur les côtes occidentales de la Corse. Le balbuzard pêcheur occupait auparavent tout le littoral rocheux de la côte ouest de l'île et a progressivement disparu au XXème siècle, jusqu'à la redécouverte de 2 couples nichant dans la péninsule de Scandola en 1970. La présence du Balbuzard pêcheur a d'ailleurs été l'un des arguments pour la création de la réservne naturelle de Scandola en 1975, inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO. Les effectifs sont passés de 4 en 1974 à 30 couples nicheurs en 2018. Aujourd’hui, c’est la diminution du succès reproducteur des couples nicheurs de balbuzards en Corse qui inquiète la communauté scientifique. En effet, le succès de reproduction chute de façon préoccupante depuis 2012 : en 2018, c’est le résultat dramatique d’un seul jeune à l’envol qui a été dénombré sur la réserve de Scandola. De nombreuses études scientifiques ont démontré la responsabilité de la surfréquentation touristique dans le déclin du Balbuzard pêcheur dans la zone de protection marine.

Sur le continent, un noyau orléanais s'est constitué à partir du premier couple nicheur qui a été découvert en 1984 dans le Loiret. Il est rejoint en 1991 par un second couple detecté à proximité. Les balbuzards pêcheurs se sont installés progressivement en région Centre dans les départements limitrophes le long de la Loire, de ses affluents et des étangs voisins et depuis, le nombre de couples nicheurs n'a fait qu'augmenter. Ce noyau concentre la majortié des couples de France continentale (46 couples en 2019). Des couples isolés se sont ensuite installés progressivement dans de nouveaux départements à proximité du noyau : Essonne (2005), Indre-et-Loire (2007), Maine-et-Loire (2011), Yonne (2011), Nièvre (2012), Sarthe (2014), Indre (2016), Allier (2017).

Dans la région Grand Est, un second noyau se constitue lentement à partir du couple installé en Moselle en 2008, rejoint d’abord par deux autres couples puis d’autres installations dans les départements limitrophes : Marne (2015), Meuse (2017), Meurthe-et-Moselle et Alsace (2018).

Après plus de 120 ans d’absence, un couple isolé s’est reproduit en 2018 dans le sud-ouest sur la première aire artificielle installée en 2005 dans les Landes. Les origines des deux oiseaux sont connues grâce au baguage. Le mâle lâché sur la Réserve de Biosphère d’Urdaibai (Pays Basque espagnol) en 2013 se reproduit avec une femelle sauvage originaire de Corse baguée en 2014.

 

Effectifs

Europe : 8 4000 - 12 300 couples (Birdlife, 2015)
France :

  • Couples : en 2019, 87 couples reproducteurs en France (28 couples en Corse et 59 couples  en France continentale)
  • Hivernants :
  • En migration : plusieurs milliers d’oiseaux traversent la France au printemps et à l’automne.

Effectifs des couples Balbuzards pêcheurs et jeunes à l'envol de 1974 à 2019

 

Statuts

En France, le Balbuzard pêcheur n’a fait l’objet de mesures réglementaires qu’à partir des années 1960, époque à laquelle il avait déjà disparu de la zone continentale. Par la suite, l’arrêté du 27 novembre 1964 a interdit sa destruction. L’arrêté ministériel du 24 janvier 1972 interdit la chasse de tous les rapaces diurnes et nocturnes en France, qui inclut donc le Balbuzard pêcheur. La loi du 10 juillet 1976 (arrêté d’application du 17 avril 1981) protège tous les rapaces : la destruction des oiseaux, des oeufs et des nids est interdite, ainsi que leur transport, leur vente, leur naturalisation. L’arrêté ministériel du 29 octobre 2009 liste le Balbuzard pêcheur parmi les oiseaux protégés sur l’ensemble du territoire et fixe les modalités de sa protection. Tout manquement à ces règles est passible de sanctions pénales.

Au niveau européen, le Balbuzard pêcheur bénéficie de différents statuts de protection.
Il figure en Annexe I de la Directive « Oiseaux » (Directive européenne 79/409/CE de1979, mise à jour par la Directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009, concernant la conservation des oiseaux sauvages). Cette directive européenne s'applique à tous les Etats membres de la Communauté depuis le 6 avril 1981. Elle vise à assurer la protection de toutes les espèces d'oiseaux désignées en Annexe I de la Directive (espèces bénéficiant de mesures spéciales de conservation, en particulier en ce qui concerne leurs habitats). Elle permet la désignation de Zones de protection spéciales qui sont destinées à renforcer le réseau Natura 2000.

Il figure également en Annexe III de la Convention de Berne (1979) qui a pour objet d'assurer la conservation, au niveau européen, de la flore et de la faune sauvages et de leurs habitats naturels, notamment des espèces et des habitats dont la conservation nécessite la coopération de plusieurs Etats.
De plus, en tant qu’espèce migratrice, il fugure à l'Annexe II de la Convention de Bonn (1982) qui lui accorde un statut de protection à l'échelle mondiale.

Comme l’ensemble des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, il est protégé par la Convention de Washington (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction - CITES de 1973). C'est un accord international entre Etats qui a pour but de veiller à ce que le commerce international des spécimens d'animaux et de plantes sauvages ne menace pas la survie des espèces auxquelles ils appartiennent.
Enfin, il est concerné par la Convention de Barcelone sur la protection du milieu marin et du littoral de la Méditerranée (1995).

Le Balbuzard pêcheur est classé en catégorie "LC - Least Concern" (préoccupation mineure) sur les Listes Rouges de l'UICN (Union international pour la conservation de la nature) au niveau mondial (UICN, 2016) et européen (UICN, 2015).  En France métropolitaine, la population nicheuse de Balbuzard pêcheur est toujours considérée comme « Vulnérable » dans la Liste Rouge UICN (2016) avec moins de 250 couples reproducteurs mais une tendance à l’accroissement des effectifs.

 

Migration et hivernage

La population européenne, à l’exception des oiseaux méditerranéens (dont les oiseaux corses), passe l’hiver en Afrique. Le balbuzard, grand migrateur au vol puissant, utilise un large front de migration et ne craint pas de traverser les mers et les déserts. Les jeunes de l’année migrent eux aussi en septembre, et restent 1 à 2 ans sur les sites d’hivernage avant de revenir en Europe.

Lors des migrations de printemps et d’automne, le balbuzard effectue des haltes sur des sites favorables (fleuves, étangs…), le plus souvent en solitaire, mais parfois par paires ou en petits groupes. Il peut séjourner durant quelques jours, voire quelques semaines. Les seuls rassemblements importants sont observés en zone d'hivernage (jusqu'à 25 individus), notamment sur les côtes de la Guyane française.

Migration d’automne : en route pour les quartiers d’hiver

L'arrivée dans les quartiers d'hiver a lieu fin septembre-début octobre. L’hivernage consiste pour un oiseau à aller passer la mauvaise saison sous un climat plus tempéré. La population d'Europe du Nord, à laquelle se joignent vraisemblablement les oiseaux nicheurs de France continentale, hiverne dans la région tropicale située entre le Sénégal et l'Ethiopie, surtout en Afrique occidentale, entre la Mauritanie, le Mali et le Gabon. Quelques oiseaux scandinaves ont aussi été signalés au sud de l'équateur et de l’Afrique. La population qui hiverne en Afrique de l'est et du sud proviendrait de Russie et peut-être d'Iran.

Migration de printemps : les nicheurs s’installent

En mars, un à plusieurs milliers de balbuzards adultes vont traverser la France. Les haltes migratoires sont plus brèves qu’à l’automne, car la concurrence pour récupérer les sites de nidification dans le nord de l’Europe est rude. En région Centre, les arrivées sur les sites ont lieu à partir de début mars (Loiret) et s'échelonnent jusqu'en avril. Les oiseaux nicheurs du bassin méditerranéen s'installent dès février. Ceux qui nichent pour la première fois arrivent en moyenne un mois plus tard que les adultes expérimentés.

Balbuzard en vol

Balbuzard en vol © N. Beer-Smith

 

Reproduction

Le Balbuzard ne se reproduit généralement pas avant sa troisième année. Des oiseaux non nicheurs de deuxième année sont cependant observés sur les sites de reproduction. Certains d'entre eux construisent une aire « d'essai », sans y pondre. Une reproduction réussie intervient souvent après plusieurs années d'essais.

Accouplement sur le perchoir au-dessus de l’aire

Accouplement sur le perchoir au-dessus de l’aire © N. Beer-Smith

L’installation

Les couples ne se forment pas dans les quartiers d’hiver. Sur le site de reproduction, le mâle construit un ou plusieurs nids au-dessus desquels il parade tous les jours pour tenter d’attirer une partenaire. La femelle va en général choisir le nid qui lui semble convenir le mieux, mais il arrive qu’elle reparte. Le mâle peut alors la suivre vers une autre région ou rester pour « proposer » ses nids à d'autres femelles. Si une femelle accepte un nid, elle participera à sa recharge (qui consiste en fait à « rafraîchir » l’ancienne aire) avec le mâle, pour ensuite s’accoupler sur le nid, après que le mâle lui ait proposé un poisson.
Les couples sont généralement fidèles au site de nidification et réutilisent la même aire, année après année. En France, trois types de supports sont utilisés par les balbuzards pour installer leur nid volumineux : les falaises, les arbres et les pylônes électriques.

Le cas particulier de la nidification sur pylône

Depuis quelques années, certains balbuzards en France continentale s'installent sur des pylônes éléctriques plutôt que sur des arbres. En effet, les pylônes fournissent les mêmes conditions de nidification que les arbres ou les falaises aux balbuzards en leur proposant un support stable et une vue dégagée, c'est pourquoi ils sont peu à peu colonisés dans de nombreuses régions d'Europe. En Allemagne, ce sont plusieurs centaines de couples qui s’y sont installées. En France, l’ébauche d’un premier nid sur pylône a été découverte en 2006 dans le Loir-et-Cher. En 2007, la reproduction est confirmée avec la présence d’un couple qui mène un jeune à l’envol. Depuis 2006, le nombre de nids sur pylône ne fait qu’augmenter, parallèlement à l’évolution du nombre de couples dans la population continentale. De 2006 à 2018, 5 nouveaux départements ont été colonisés ; pour certains, le couple nicheur sur pylône fut le premier nicheur du département (Sarthe, Maine-et-Loire).

L’aire

Le nid est installé sur un site tranquille, élevé, offrant un large champ visuel, souvent à proximité des lieux de pêche, mais pas nécessairement au bord de l'eau : certains couples peuvent se déplacer sur plusieurs kilomètres pour s'alimenter et nichent en pleine forêt, notamment dans des clairières. Le nid est réutilisé pendant plusieurs années successives par le même couple, même après un échec de la reproduction.

En Corse, les balbuzards nichent sur directement sur les falaises.

Balbuzard sur nid naturel

Balbuzard sur nid naturel © E. Sans

L'aire est construite à l'aide de branches mortes collectées sur le sol, à la surface de l'eau, ou sur les arbres. Son centre est garni à l'aide de matériaux plus fins : brindilles, herbes, feuilles, mousse... L'aire atteint 1 m à 1,5 m de diamètre, parfois plus. Sa construction prend 2 à 3 semaines. Elle est rechargée en branches chaque année. À la longue, sa hauteur peut atteindre exceptionnellement 2 m (en région Centre, la plupart des aires sont hautes de 40 à 70 cm). La présence d’aires anciennes conditionne en partie le succès de la reproduction.

La ponte et l'incubation

La ponte compte en général 2 à 3 oeufs, pondus entre 1 et 3 jours d'intervalle. L'incubation dure entre 34 et 40 jours et débute dès la ponte du premier oeuf, entre mi-avril et début mai. Les deux partenaires participent à la couvaison. Les écolisions sont asynchrones. Les poussins sont nidicoles, c’est-à-dire qu’ils naissent incapables de se déplacer et de se nourrir par eux-mêmes. La femelle reste au nid en permanence pendant les 10 premiers jours.

L’élevage des jeunes

Le mâle s'occupe exclusivement d'apporter les proies à la femelle au nid qui se charge de nourrir les poussins. Âgés de 7 à 8 semaines, les jeunes prennent leur envol progressivement. Après l'envol, les apports de proies diminuent pour inciter les jeunes à partir pêcher. Ils accompagnent le mâle sur les sites de pêche pour apprendre à se nourrir seuls. L'émancipation a lieu 6 semaines plus tard.

La famille peut rester unie jusqu'en automne (jusqu’en juillet-août dans le Centre). La femelle quitte le site de reproduction la première, suivie de peu par les jeunes. Le mâle part le dernier.

Poussins à 10/12 jours

Poussins à 10/12 jours © B. Guillois

 

Régime alimentaire

Le balbuzard est presque exclusivement piscivore, c’est-à-dire qu’il ne mange que du poisson. Il pêche le plus souvent en eau claire, où les proies sont facilement visibles (les oiseaux corses en eau salée et ceux du continent en eau douce).

Un rapace spécialisé…

Il capture des poissons qui nagent en surface et peut s’immerger sous l’eau jusqu’à 1 m de profondeur, après les avoir repérés en vol ou depuis un perchoir.

Plusieurs adaptations morphologiques relatives à cette technique de capture font du balbuzard un pêcheur spécialisé : pattes et serres assez longues et très fortes, serres très incurvées (avec la particularité de pouvoir mettre deux doigts en avant et deux doigts en arrière), aspérités sur la face inférieure des doigts permettant une bonne prise des poissons visqueux, plumage dense et compact.

Balbuzard à la pêche

Balbuzard à la pêche © Illustration : A. Nouailhat

 …mais pas difficile

La diversité des espèces de poissons exploitées est considérable, qu'elles soient d'eau douce ou d'eau salée. Ces poissons mesurent de 10 à 50 cm (25 cm en moyenne) et pèsent de 50 g à 1,7 kg (250 g en moyenne). On cite des cas de balbuzards qui se sont noyés, les serres coincées dans les os ou les écailles des proies trop lourdes, habituellement relâchées.

Pêche dans la Loire © B. Quinstard

 

Utilisation des habitats

Si l’on peut trouver le balbuzard pêcheur dans la plupart des grandes régions poissonneuses, il ne s’installe pas non plus n’importe où.

Une condition générale : du poisson

Le balbuzard est présent dans une gamme très large de climats : en Europe, en Asie, en Océanie, en Afrique du Nord et de l’Est, ainsi qu’en Amérique du Nord. Il évite les régions les plus arctiques et de haute montagne. Sa présence dépend entièrement de la disponibilité en poissons. Peu lui importe la salinité du milieu : l'espèce niche aussi bien en bordure de mer que loin à l'intérieur des terres.

Des exigences locales

Localement, il peut se montrer assez exigeant. Il niche presque exclusivement dans les arbres dans le nord du Paléarctique (sauf sur des pylônes électriques en Allemagne), en général à proximité de lacs ou de cours d'eau. Il s'installe uniquement sur des parois rocheuses et des petits îlots en région méditerranéenne, où il est cantonné au littoral.

Ailleurs, où il existe encore des populations abondantes (Amérique du Nord), on le rencontre sur des sites parfois inattendus : pylônes électriques, ponts, tours, ruines, au sol... Le choix du site de nidification est beaucoup plus large dans les régions où la densité de couples nicheurs est plus élevée. Il niche au sol sur la plupart des îlots le long de la Mer Rouge, ainsi qu’en Nouvelle-Calédonie et en Australie.

Aire sur piton rocheux en Corse

Aire sur piton rocheux en Corse © J-M. Dominici

A gauche : milieu urbain ; à droite : zone naturelle

A gauche : milieu urbain ; à droite : zone naturelle © P. Hauff

 

Mue

La mue d'été intervient après la reproduction et dure 2 mois : juillet et août. Celle d'hiver commence en novembre dans les zones d'hivernage et se poursuit jusqu'en février. Elle se termine juste avant la migration de retour. Elle dure presque 3 mois.

 

Survie et mortalité

La survie annuelle des balbuzards adultes (plus de 2 ans) est assez élevée (longévité maximale : 24-25 ans dans la nature).
La survie des jeunes et des sub-adultes est plus difficile à évaluer. Ils ne sont pas territoriaux dès la première année, les chances de les contrôler sont donc moindres. 43 à 60 % des jeunes à l'envol seraient encore en vie après un an. Globalement, sur 100 jeunes balbuzards qui survivent jusqu'à l'envol, 37 seront encore en vie quatre ans plus tard, et auront la possibilité de se reproduire. Huit ans après, 17 d'entre eux seront encore en vie. Seuls 6 à 8 atteindront l'âge de 12 ans.
Il existe des nicheurs de plus de 20 ans. On cite un oiseau bagué qui a vécu 27 ans.
Le balbuzard ne supporte pas la captivité et y meurt en moyenne au bout de deux ans.

 

Comportements

Un rapace peu territorial…

Un des traits les plus marquants du balbuzard est son caractère grégaire. En effet, le territoire défendu, de taille très variable, se limite aux abords immédiats de l'aire. Le territoire de pêche n'est pas défendu. Le balbuzard diffère en ce sens des autres oiseaux de proie qui défendent un territoire de chasse. Par contre, des disputes, parfois violentes, sont fréquentes près du nid.

… et plutôt social

Les couples peuvent aussi s'installer en colonies lâches, les nids étant séparés de quelques centaines de mètres, voire quelques kilomètres, comme c'est le cas en région Centre. Cependant, de vraies colonies existent en Amérique du Nord, notamment, à proximité de sites très poissonneux. Les nids y sont séparés tout au plus de quelques dizaines de mètres. De tels cas n'ont pas été décrits en Europe.

Pour choisir l’emplacement optimal de l’aire, qui doit convenir aux exigences écologiques de l’espèce, et évaluer la qualité du milieu environnant, les aires artificielles sont installées suite à une expertise.

 

Une espèce vulnérable

Le balbuzard a été éradiqué !

Autrefois commun sur les rivières et étangs français, le balbuzard a disparu de la France continentale au début du XXe siècle. Il n’a jamais disparu de Corse, mais seulement 4 couples y étaient présents en 1974.

Depuis lors, grâce au statut de protection dont jouissent les rapaces depuis une vingtaine d’années et grâce aux actions de protection spécifiques, les effectifs du balbuzard progressent lentement. Les populations augmentent également un peu partout en Europe.

 

Les menaces

Si le balbuzard pêcheur connaît comme tout être vivant des menaces naturelles, le plus grand danger reste pour lui l’activité humaine.

Menaces liées à l’homme

  • Destructions directes : Les persécutions (tirs, piégeages, destructions de nids, collectionneurs d’œufs) ont largement contribué à la raréfaction du balbuzard et à la disparition des nicheurs français. Ces destructions directes ont baissé de façon significative mais subsistent ponctuellement.
  • Dérangements : les balbuzards européens sont très sensibles au dérangement humain (exploitation forestière, photographes peu prudents, tourisme, navigation) en période de reproduction, car les persécutions dont ils ont fait l’objet pendant des siècles ont sélectionné les individus les plus craintifs à l’égard de l’homme. Or, si des adultes dérangés quittent le nid, les œufs et les jeunes exposés quelques heures au froid ou au soleil peuvent être victimes de prédateurs.
  • Collision avec des installations humaines : la collision et l’électrocution avec des lignes électriques est devenue une des principales causes de mortalité.
  • Pollution : pesticides et autres polluants peuvent produire des effets négatifs sur la reproduction du balbuzard.
  • Abandon des lignes de pêche : c’est une menace d’origine humaine difficile à évaluer. Le danger provient surtout des poissons pêchés ayant brisé leur ligne qui représentent des proies faciles. Les oiseaux peuvent s’étrangler, s’emmêler dans les fils de pêche, se blesser avec l’hameçon ou avaler des plombs.
  • Limitation des sites disponibles de reproduction par la présence humaine.

Menaces naturelles

On note des cas de prédation occasionnels sur des œufs par des corvidés ou des goélands. Ces cas surviennent lorsque les adultes ne défendent pas le nid : soit en raison de leur manque d’expérience, soit parce qu’ils sont contraints de quitter le nid, dérangés par une présence humaine. La martre, commune en milieu boisée, peut également détruire une nichée de balbuzard. Les intempéries, pluies et températures basses, peuvent entraîner des échecs de nidification, notamment en cas de dérangements anthropiques.

En Amérique du nord, le balbuzard subit régulièrement le parasitisme du pygargue à queue blanche, avec lequel il est en compétition pour la nourriture (le pygargue pouvant lui ravir ses proies). Le grand-duc peut être un prédateur occasionnel, ainsi que le raton laveur. En France, le pygargue et le raton laveur sont, à l’heure actuelle, d’apparition exceptionnelle ; et le grand-duc ne fréquente pas les mêmes sites que le balbuzard en période de reproduction.

Balbuzard pêcheur et corneille noire

Balbuzard pêcheur et corneille noire © F.Cahez

Effectifs et répartition

Corse

En Corse, les oiseaux se répartissent sur la côte occidentale où ils furent relégués durant le XXe siècle. Le nord-ouest de l’île ne fut jamais déserté et constitua le dernier refuge de l’espèce dans les années 1970. Aucun changement n’a été noté dans la répartition de la population reproductrice depuis la décennie 1990.

Depuis le début des années 1990, l’effectif des balbuzards pêcheurs en Corse a connu une légère augmentation : 20 couples étaient reproducteurs en 1993, et 29 en 2009. On constate que la productivité moyenne des couples nicheurs de Corse est moindre entre 1990 et 1995 qu'entre 1977 et 1989. Cette diminution, imputable à l'augmentation de la densité des couples (Tariel & Thibault, 1996). Cette évolution est cependant assez chaotique, comme le montre l’accident démographique de 1996-1997. La forte variabilité annuelle observée s’explique par la saturation des sites disponibles et la compétition intraspécifique qui en résulte.

Suivi du Balbuzard en Corse de 1993 à 2009

Suivi du Balbuzard en Corse de 1993 à 2009

France continentale

En France continentale, la population de balbuzard se répartit en deux principaux sites de la région Centre : la forêt d’Orléans (45), et la forêt de Chambord (41). D’autres départements de la région Centre sont fréquentés en période de reproduction dont l’Indre et Loir et le Cher.

Des reproductions isolées sont régulièrement observées depuis quelques années. En Ile de France, un couple s’est installé dans un site protégé où il s’est reproduit avec plus ou moins de succès depuis 2005. En Lorraine, c'est en 2007 qu'un couple s’est d'abord installé, menant des jeunes à l’envol à partir de 2009. La situation a bien évolué, avec trois couples installés en 2017, amenant chacun 3 jeunes à l'envol. Les couples ont notamment pu s'installer grâce à des plateformes construites par l'ONF et l'association LOANA.

Dans les Landes, des oiseaux sont régulièrement notés en haltes migratoires et parfois en période de nidification.
Les observations en période de migration sont communes sur tout le territoire.

Suivi du Balbuzard en France continentale de 1984 à 2009

Suivi du Balbuzard en France continentale de 1984 à 2009

Les aires artificielles

L’aire du balbuzard est un édifice imposant. Sa construction et son emplacement sont déterminants pour la réussite de la nidification. Pour encourager les oiseaux à coloniser de nouveaux milieux et fixer des couples, des aires artificielles leur sont proposés.

Les jeunes oiseaux qui nichent pour la première fois préfèrent souvent s'installer sur une ancienne aire inoccupée. D'autres, ne trouvant pas de site favorable pour installer leur aire, diffèrent leur reproduction. La construction d'aires artificielles encourage donc une partie de la population estivante à nicher, et notamment les jeunes oiseaux, qui, inexpérimentés, arrivent souvent trop tard pour trouver une aire disponible.

De plus, le balbuzard niche en colonie lâche : la présence d’oiseaux et d’aires sur un site joue un rôle pour retenir les oiseaux de passage. Les balbuzards répugnent à coloniser des sites où l’espèce n’est pas déjà présente (attraction intraspécifique). La présence de plusieurs aires sur un site leurre les oiseaux qui s’y installent plus facilement.

En forêt d’Orléans, la mise à disposition d’aires artificielles a contribué à retenir des balbuzards allemands et a eu un impact positif sur la dynamique de population.

Pour choisir l’emplacement optimal de l’aire, qui doit convenir aux exigences écologiques de l’espèce, et évaluer la qualité du milieu environnant, les aires artificielles sont installées suite à une expertise.

aire artificielle

Une aire artificielle en région Centre © B.Quinstard

Les expertises

Certains milieux sont susceptibles d’accueillir une population reproductrice de balbuzard. Afin d’évaluer les potentialités d’accueil des sites et d’étudier les aménagements envisageables, des expertises sont effectuées par un spécialiste de l’espèce à la demande des gestionnaires.

Selon les résultats de l’expertise, les gestionnaires de sites peuvent mettre en œuvre les préconisations pour favoriser l’installation de couples : pose d’aires artificielles, maintien d’arbres propices, limitation des dérangements, etc.

Les prospections

En France, le balbuzard fréquente de nombreux sites en période de migration. Il est beaucoup plus rare en période de reproduction (mai-juillet). Partout en France, sur les sites a priori favorables, une veille est essentielle pour repérer la présence d’éventuels couples pionniers.

Études

L’amélioration des connaissances est une priorité du plan national d’action

Les recherches concernent notamment la dynamique de population, dont les paramètres sont étudiés grâce aux résultats du baguage et du suivi de terrain. 

D’autres recherches sont en cours, pilotée par le Museum des sciences naturelles d’Orléans et portent sur l’écotoxicologie et le régime alimentaire, etc. (voir "Balbuzard info 20/21" et "Rapaces de France 2010")

En savoir plus

Un PNA en faveur du Balbuzard pêcheur