Monsieur le Président de la République,
Le 7 mai 2017, nos concitoyens vous ont confié la charge éminente de veiller au respect de la Constitution, et d’assurer, par votre arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'État. Ils ont fait de vous le « garant de l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire et du respect des traités » (article 5 de la Constitution).
Les Français vous ont renouvelé cette confiance et ce mandat le 24 avril 2022. Six jours auparavant, vous aviez proclamé solennellement : « La politique que je mènerai dans les cinq ans à venir sera écologique ou ne sera pas ».
Dans les jours qui viennent, sauf censure intégrale par le Conseil Constitutionnel, vous serez en situation de promulguer la loi proposée par le sénateur Laurent Duplomb et votée sans débat par l’Assemblée nationale le 8 juillet dernier.
Adoptée en Commission mixte paritaire grâce à un subterfuge procédural inédit sous la Ve République, cette proposition de loi n’a pas pu être discutée ni amendée par les députés, ainsi mis dans l’incapacité d’exercer le mandat de législateur qui leur a été démocratiquement confié. Ce tour de passe-passe constitue à nos yeux une grave atteinte au fonctionnement régulier des pouvoirs publics et de l’esprit, sinon de la lettre, de notre Constitution.
En quelques jours, plus d’un million et demi de Français ont exprimé leur rejet de ce texte en signant sur le site de l’Assemblée nationale une pétition qui rappelle que : « La Loi Duplomb est une aberration scientifique, éthique, environnementale et sanitaire. Elle représente une attaque frontale contre la santé publique, la biodiversité, la cohérence des politiques climatiques, la sécurité alimentaire, et le bon sens. Cette loi est un acte dangereux. Pour les travailleurs, les habitants, les écosystèmes, les services écosystémiques, et pour l’humanité tout entière. Elle fragilise les réseaux trophiques et compromet la stabilité de notre environnement — dont nous dépendons intégralement. Nous sommes ce que nous mangeons, et vous voulez nous faire manger quoi ? Du poison ».
Par ailleurs, vingt-deux sociétés savantes médicales ont manifesté publiquement leur opposition à cette loi qui organise le saccage de notre environnement sanitaire. La Ligue contre le cancer a fait part de sa consternation. Les agriculteurs de la Confédération paysanne ont dénoncé ce texte ravageur pour leur santé et celle de tous les citoyens. La Fédération des mutuelles de France, qui voit arriver les coûts délirants et les vies brisées pour leurs millions d’adhérents, s’est insurgée, comme l’ont fait la Fédération des régies d’eau potable et le conseil scientifique du CNRS.
Monsieur le Président de la République, l’article 10 de notre Constitution vous donne le pouvoir, avant de promulguer une loi, de « demander au Parlement une nouvelle délibération de la loi ou de certains de ses articles ».
Au titre de votre fonction de gardien de nos institutions républicaines et démocratiques ; au nom de l’indignation exprimée par plusieurs centaines de milliers de Françaises et de Français, nous vous demandons donc solennellement de ne pas promulguer cette loi en l’état, et de la renvoyer au Parlement pour un nouvel examen.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre plus haute considération.
Pour la LPO : Allain BOUGRAIN DUBOURG, Président
Pour H&B : Bernard CHEVASSUS-AU-LOUIS, Président