La PAC insuffisante pour réduire les risques liés aux pesticides dans l'UE

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Alors que la nécessité d'un avenir sans pesticides est devenue de plus en plus évidente sachant très bien le risque sérieux qu'ils représentent pour la santé humaine, la biodiversité et l'environnement, les agriculteurs européens dépendent encore fortement de l'utilisation de pesticides agricoles synthétiques. Les conclusions d'une récente étude conjointe du Bureau européen de l’environnement (EEB) et de BirdLife montrent que les législateurs de l'UE doivent faire beaucoup plus pour prévenir les dommages graves que les pesticides peuvent causer aux personnes et à la planète.

La nouvelle architecture verte de la Politique Agricole Commune (PAC) pour 2023-2027 est censée être un outil crucial pour atteindre les objectifs du Green Deal - y compris des ambitions plus élevées pour une utilisation durable des pesticides dans l'UE. Face au besoin urgent de résoudre le problème des pesticides et la crise de la biodiversité en Europe, la Commission propose de réduire de moitié l'utilisation et les risques des pesticides chimiques et plus dangereux dans l'UE d'ici 2030 dans le cadre de sa stratégie De la ferme à la fourchette.

En théorie, la nouvelle PAC devrait donc soutenir les agriculteurs dans l'utilisation durable et réduite des pesticides grâce à un certain nombre de règles et de mesures. Plus précisément, les États membres ont eu la possibilité de concevoir des interventions dans leurs plans stratégiques de la PAC destinées à réduire la dépendance nationale à l'égard des pesticides nocifs.

Le 22 juin, la CE a lancé sa proposition de nouvelles règles européennes sur les pesticides qui transformeront l'actuelle directive sur l'utilisation durable des pesticides (SUD) en un règlement. Afin d'assurer une meilleure mise en œuvre de ces règles sur les pesticides que par le passé, la Commission a expliqué que les États membres pourront également utiliser les fonds de la nouvelle PAC pour indemniser leurs agriculteurs des coûts de mise en œuvre de ce règlement.

La France a terminé de négocier son plan stratégique national avec la Commission Européenne le 15 juillet 2022. Il doit ensuite être approuvé par les commissions agriculture et environnement début septembre. Avec des objectifs de réduction de pesticides sur 55,9% de sa surface agricole, la France semble faire partie des bons élèves. En apparence seulement : les surfaces concernées par une « gestion durable des pesticides » sont toutes les surfaces engagées dans la voie « pratiques » ou « certification » de l’éco-régime dont le contenu (à l'exception de la certification bio) ne garantit en réalité aucunement une diminution des pesticides, ainsi que les surfaces concernées par la Mesure agroenvironnementale et Climatique (MAEC) « qualité et gestion quantitative de l’eau pour les grandes cultures » qui demeure anecdotique faute de budget et d'ambition.

D'une manière générale, une étude conjointe du Bureau européen de l’environnement (EEB) et de BirdLife montrent que les États membres de l'UE prévoient une mise en œuvre trop faible des exigences d'utilisation des pesticides, encore affaiblie par l'absence de calendriers et d'échéances dans les plans qu'ils ont soumis. Ces lacunes compromettront les plans de la PAC dans le sens où ceux-ci ne seront pas en mesure de réduire les pesticides et d'atteindre les objectifs des stratégies de la ferme à la fourchette et de la biodiversité. Les États membres devraient renforcer leurs éco-régimes et les mesures du deuxième pilier de la PAC pour passer à des pratiques agro-écologiques qui permettraient une bonne mise en œuvre de la lutte intégrée contre les ravageurs et une véritable réduction de l'utilisation des pesticides, comme l'exige la législation de l'UE.

Messages clé

  • Les pesticides agricoles sont toxiques par conception, destinés à tuer les organismes vivants. Nous devons les empêcher de contaminer nos sols, l'air et l'eau, et d'affecter la santé des personnes et l'environnement.
  • La CE s'est engagée  à réduire l'utilisation de pesticides de 50 % d'ici 2030. Les États membres seront bientôt légalement tenus d'atteindre ces objectifs.
  • Pour un véritable passage à des pratiques agro-écologiques qui réduisent de manière significative l'utilisation de pesticides et mettent en œuvre de manière approfondie la lutte intégrée contre les ravageurs, les États membres de l'UE doivent renforcer leurs éco-régimes et les mesures du pilier 2 de la PAC.
  • Pour assurer une agriculture durable et résiliente, les plans stratégiques de la PAC doivent inclure des subventions qui encouragent les agriculteurs à utiliser des alternatives agronomiques, mécaniques, physiques et biologiques non chimiques aux pesticides et assurer un soutien financier et technique, en particulier aux agriculteurs qui montrent des résultats dans leur transition vers pratiques agricoles (faibles en intrants) qui visent à réduire l'utilisation d'engrais chimiques et de pesticides.