Circaète Jean-le-Blanc

Conseil Biodiversité
Circaète Jean-le-Blanc

Circaète Jean-le-Blanc © Christian Aussaguel

Le circaète est un grand rapace d’apparence blanche assez facilement observable en vol ou perché sur le sommet d’un arbre, un rocher ou un pylône électrique. Le circaète est un spécialiste du vol stationnaire qu’il pratique couramment, même par vent fort, pour repérer ses proies.

Le ventre et les sous-caudales sont blancs, parsemés de taches ou de flammèches beiges à marron chocolat. L’extrémité des rémiges est noire. La tête, la gorge et la poitrine sont d’un brun plus ou moins foncé. La coloration générale, le nombre et la taille des taches varient d’un individu à l’autre, mais restent fixes dans le temps. Certains individus pouvant présenter un plumage presque entièrement blanc en dessous, avec seulement quelques marques beiges sur la partie inférieure du plastron. Sur le dos, le contraste entre les couvertures alaires plus claires et les rémiges sombres est bien marqué. La queue est barrée de trois bandes sombres plus ou moins larges.

Sa grosse tête rappelle celle d’une chouette et ses yeux en position quasiment faciale, sont jaune pâle chez les jeunes et se pigmentent au cours du temps pour devenir jaune d’or à orangé chez l’adulte.
Les tarses gris jaune sont longs et couverts d’écailles épaisses. Les doigts sont courts, adaptés à la capture des reptiles. C’est cette caractéristique qui apparait dans son nom anglais : short-toed eagle. Le bec est gris-bleu et bordé d’une cire grisâtre.
Comme chez la majorité des rapaces, la femelle est plus grosse que le mâle (la taille de ce dernier correspond à 91% de celle de la femelle).

Crédit photo : Guy Bourderionnet

Répartition et effectifs

Le circaète est bien présent sur le pourtour méditerranéen (Espagne, Turquie, France, Italie, Grèce) – les îles étant exclues –, le Moyen-Orient, l’Asie centrale et l’Afrique, mais aussi des pays du nord et de l’est de l’Europe (Finlande, Estonie, Pologne, Ukraine, Russie et Biélorussie). Des présences ponctuelles sont aussi notées en Roumanie, Hongrie, Slovaquie, Albanie et ex-Yougoslavie. La population mondiale serait estimée à 12 000 – 26 000 couples (Raptors of the World, 2001).

En Europe, l’effectif serait de 4 200 à 6 000 couples (Birdlife International, 2000). Les populations les plus importantes se trouvent en France (2400/2900 couples) et en Espagne (1700/2100 couples).

En France, l’espèce se reproduit au sud d’une ligne Vendée- Maine-et-Loire – Loiret – Doubs. La population française semble stable avec 2 400 à 2 900 couples nicheurs (Rapaces nicheurs de France, 2004).

Le circaète, comme toutes les espèces de rapaces, est protégé en France, selon la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, codifiée aux articles L-411-1 et suivants du code de l’environnement. (Voir également l’arrêté d’application modifié du 17 avril 1981 fixant les listes des oiseaux protégés sur l’ensemble du territoire)
Il figure en annexe I de la Directive « Oiseaux » (n° 79/409 du 6 avril 1979). Cette directive européenne s'applique à tous les Etats membres de la Communauté, depuis le 6 avril 1981. Elle vise à assurer la protection de toutes les espèces d'oiseaux désignées en annexe I de la dite Directive et elle permet la désignation de Zones de protection spéciale, qui sont destinées à renforcer le réseau Natura 2000.

Le Circaète, figure également en annexe II de la Convention de Berne du 19 septembre 1979 qui a pour objet d'assurer la conservation, au niveau européen, de la flore et de la faune sauvages et de leurs habitats naturels, notamment des espèces et des habitats dont la conservation nécessite la coopération de plusieurs Etats.

Photo Christian Aussaguel

Statuts

Considéré comme une espèce migratrice se trouvant dans un état de conservation défavorable et nécessitant l’adoption de mesures de conservation et de gestion appropriées dans certaines régions d’Europe, il figure à l’annexe II de la Convention de Bonn du 23 juin 1979 qui lui accorde un statut de protection à l'échelle mondiale.

Le Circaète est protégé par la Convention de Washington ou CITES du 03 mars 1973 et figure à l’annexe II concernant les espèces qui, bien que n'étant pas nécessairement menacées actuellement d'extinction, pourraient le devenir si le commerce de leurs spécimens n'était pas étroitement contrôlé. Cette Convention sur le commerce international des espèces est un accord international entre États qui a pour but de veiller à ce que le commerce international des spécimens d'animaux et de plantes sauvages ne menace pas la survie des espèces auxquelles ils appartiennent. D’autre part, le circaète figure à l’annexe C1 du règlement communautaire n°3626/82/CEE relatif à l’application de la CITES dans l’Union européenne.

A l’échelle européenne, d’après les critères définis par Birdlife International (Tucker & Heath, 1994), le circaète est classé dans la catégorie SPEC 3 (espèce non concentrée en Europe au statut de conservation défavorable). Elle figure sur la liste rouge de l’UICN des espèces menacées de disparition au niveau mondial et sur la liste rouge des espèces menacées de disparition en France, dans la catégorie « LC » « préoccupation mineure ».

 

Biologie et écologie

Habitat

Les circaètes nichent sur des arbres : pins, sapins, chênes, hêtres, etc. selon les essences locales. Les sites de reproduction sont le plus souvent des vallons présentant une grande quiétude.
Les terrains de chasse sont les zones ouvertes et riches en reptiles : terrains rocailleux, adrets ou soulanes, landes faiblement boisées, régénérations et clairières forestières, garrigues et maquis, prairies à pâturage extensif, friches, jachères et cultures (vignes, vergers..), etc.

Reproduction

L’installation

Début mars, les oiseaux reviennent sur leurs sites de nidification. Si les deux individus du couple sont de retour de migration, les parades et recharges d’aire sont rapidement observées. Les parades nuptiales sont assez discrètes, les couples se contentant de voler à deux et le mâle offrant des proies à la femelle, perchés sur l’arbre portant l’aire. Des vols territoriaux avec transport de proie sont également observés.

L’aire

L’aire du circaète, rechargée ou construite entre mars et avril, est relativement petite comparée à la taille du rapace : moins de 1m de diamètre pour une épaisseur de 20 à 30 cm, et faite de rameaux de bois de l’épaisseur d’un crayon. L’intérieur du nid est couvert de feuilles vertes ou d’aiguilles de pins.
Les circaètes établissent leur aire sur des branches dégagées ou sur le sommet des arbres tabulaires (pins). Cette position les rend vulnérables aux intempéries mais l’envergure des circaètes ne leur permet pas d’établir une aire solide à une enfourchure de l’arbre.

Crédit photo : A Calvet

La ponte

La femelle ne pond qu’un seul œuf début avril. En Haute-Loire et en Lozère, par exemple, la période de ponte s’étend de fin mars à mi-mai, avec un pic du 6 au 17 avril.

L’incubation

L’incubation dure de 45 à 47 jours et est essentiellement effectuée par la femelle. Le mâle lui apporte des proies une à deux fois par jour et reste aux abords du nid quand il ne chasse pas.

L’élevage des jeunes

Après l’éclosion, entre fin mai et début juillet, la femelle reste au nid avec le jeune pendant un mois et demi, le protégeant des intempéries. 21 jours après, elle part en chasse elle aussi afin d’aider le mâle dans l’apport de nourriture. Mais c’est la femelle seule qui nourrit le jeune.
Vers 45 jours, le plumage des juvéniles est quasiment complet bien que les plus grandes plumes des ailes et de la queue continuent leur croissance. Le premier envol a lieu durant la seconde quinzaine d’août. Il s’écoulera ensuite entre 40 et 60 jours avant que le jeune quitte le site de leur naissance pour partir en migration, au mois de septembre.

Régime alimentaire et techniques de chasse

Les reptiles, et principalement les serpents, constituent 90 % de son régime alimentaire. Les micromammifères, les amphibiens et les oiseaux n’excèdent pas 5 % de son alimentation.

La technique de chasse du circaète est liée à la saison et aux conditions météorologiques. Par conditions de vol difficile, il chasse à l’affût, scrutant le sol de la cime d’un arbre ou du haut d’un rocher. En début de printemps, il exploite particulièrement les versants chauds, où les premiers reptiles font leurs premières sorties et les bords de plans d’eaux, où des amphibiens notamment se réunissent.
Mais le circaète pratique plus couramment le vol stationnaire. La tête parfaitement fixe, quelle que soit la force du vent, il scrute ses terrains de chasse jusqu’à repérer une proie sur laquelle il fond rapidement, en parachute. Plusieurs étapes peuvent être nécessaires au circaète pour ajuster la trajectoire.

Une fois maitrisée, la proie est immédiatement ingérée et emportée dans le jabot, la queue dépassant souvent du bec. Ses serres courtes sont bien adaptées à ce type de proies, ainsi que les écailles épaisses au niveau des tarses, qui limitent les risques de morsures graves. Toutefois, il n’est pas immunisé contre le venin des vipères.

Migration et hivernage

De mi-août à mi-octobre (voire novembre parfois), les circaètes migrent via le Bosphore et Gibraltar dans toute la zone sahélienne. Les individus des populations orientales migrent généralement plus vers le sous-continent indien et de temps en temps au sud-est de l’Asie. Les circaètes se déplacent seuls ou en petits groupes, mêlés à d’autres espèces de rapaces qui effectuent le même trajet. Ces quartiers d’hiver sont occupés de septembre à mars et le retour a principalement lieu entre mi-mars et mi-avril. Occasionnellement, il peut avoir lieu fin février en France.