Pouillot fitis

Conseil Biodiversité

Un petit passereau migrateur et discret, identifiable à la douce cascade de son chant.

Pouillot fitis © JB. Alemanni

Tant qu’il se tait, il passe inaperçu

Oui, ce petit passereau de la taille d’une mésange (11 cm, 7 à 15g) passe inaperçu ou du moins ne se distingue pas facilement de ses cousins autres Pouillots, notamment le Véloce ; néanmoins, le Fitis est plus élancé, son plumage tire plus sur le vert olive et son sourcil jaunâtre souligné de brun est plus marqué. Son ventre et sa gorge sont plutôt jaunes, surtout après la mue, cette couleur est plus ou moins marquée suivant les individus et devient moins vive avec l’usure ; ses pattes sont de couleur claire, mais peuvent aussi être de couleur sombre comme celles du Véloce. Un signe distinctif difficile à utiliser à moins qu’un Pouillot fitis ne vienne vous manger dans la main : ses ailes possèdent trois rémiges primaires dont le vexille externe se rétrécit vers la pointe, alors que le Véloce en a quatre (d’après Paul Géroudet). De plus, et c’est visible aux jumelles, le Pouillot fitis a les ailes plus longues.

Mais quand il chante, pas de doute possible : son chant mélodieux ressemble, en plus doux, à celui du pinson – Paul Géroudet parle d’une « cascade gentiment nostalgique » -… alors que le Véloce, fort justement appelé « Chiff Chaff » en anglais, est un terne « compteur d’écus » !

Son cri : « uid, uid, uid » ressemble à celui de son cousin le Pouillot véloce, en plus léger et plus flûté.

Femelle et mâle se ressemblent, les jeunes ne sont pas très différents non plus, hormis leur taille et leur ventre très jaune.

Le Pouillot fitis est l’un des rares passereaux à effectuer deux mues complètes annuelles : l’une sur l’habitat d’hiver, et l’autre sur le site de reproduction.

Une nombreuse cousinade

Le Pouillot fitis a de nombreux cousins avec lesquels on peut le confondre : une bonne dizaine d’entre eux ne sont présents sur l’Hexagone que lors de leur migration, car ils vont nicher plus au nord en Europe. Cependant, nous pouvons rencontrer :

  • Le Pouillot véloce, gris brun, au chant caractéristique « huit, huit, huit », et qui partage son habitat avec le Pouillot fitis ;
  • Le Pouillot siffleur, le plus grand et le plus coloré des Pouillots, avec un ventre blanc et un sourcil jaune bien marqué, et qui affectionne les forêts de chênes ou de hêtres ;
  • Le Pouilot de Bonelli, au plumage gris ou brun avec le ventre blanc, le croupion jaunâtre et un sourcil presque blanc, et qui se retrouve plus en moyenne montagne ;
  • Le Pouillot ibérique, très apparenté au Pouillot véloce, mais qui aime les forêts et maquis méditerranéens.

Le Pouillot fitis n’est pas exclusif : il peut cohabiter sur le même territoire avec d’autres congénères ou cousins. La longévité maximum observée est de dix ans et trois mois (en général, sept ans).

Modeste jusque dans son mode de vie

C’est une espèce de l’écozone paléarctique, qui peut nicher jusque dans les zones boréales. Ceux qui nichent dans nos contrées affectionnent les lisières des bois de feuillus (saules, aulnes, peupliers) bordant les cours d’eau (ripisylves) et les fourrés des plaines humides, ou même les marais ou les tourbières plantées de pins ou de bouleaux, dont on peut dire que le Pouillot fitis est l’oiseau typique ; il préfère les fourrés frais et humides aux grands arbres et ne s’aventure guère dans les environnements asséchés ou en montagne au-delà de la limite des feuillus (1300 à 1500m). En migration, il peut faire étape dans une roselière.

Il se nourrit principalement d’insectes, voire de petites araignées, adultes ou à l’état d’œufs ou de larves. C’est aussi un grand amateur de pucerons… En saison, il ne dédaigne pas les baies de sureau ou les groseilles.

Pouillot fitis © A. Dusart / LPO-IDF

Premier prix du camouflage pour le nid

Les mâles arrivent sur les lieux de nidification largement avant les femelles, afin d’établir leur territoire. Une fois les femelles arrivées et les couples formés, les préliminaires ne sont pas très longs ni sophistiqués avant l’accouplement... La femelle se met seule à construire son nid sur le sol, voire dans une petite excavation, et à couvert d’un buisson ou d’un fourré, plus rarement sur un arbuste sans dépasser un mètre de hauteur. Le nid est en forme de dôme avec une entrée dissimulée au ras du sol et la femelle prend garde qu’il ne se distingue en rien de son environnement, en l’entourant d’herbes, de feuilles et de mousse. Elle le garnit abondamment de duvet et de plumes. La couvée comprend 6 à 7 œufs, qu’elle couve seule durant 12 à 15 jours. Une fois éclos, les jeunes restent au nid encore une quinzaine de jours, nourris par les deux parents, avant de s’aventurer au dehors, puis de s’envoler une dizaine de jours plus tard. Il peut y avoir une couvée de remplacement qui comprend en général 4 œufs.

Migrations en ordre dispersé

Dès le mois de juillet, après la mue, les Pouillots fitis se préparent à la migration vers leurs quartiers d’hivernage en Afrique sub-saharienne ou même australe. Il faut noter qu’avec le réchauffement climatique, leur périple s’allonge, car ils nichent de plus en plus au nord de l’Europe…ce peut être une raison du déclin de leur population. Les jeunes partent un peu plus tard, vers fin août. Tout le mois d’août et début septembre, le passage des migrateurs est intense.

Ils seront de retour en Europe dès fin février dans le midi de la France, mi-mars en Suisse Romande. La migration va ainsi s’échelonner jusqu’en juin, période à laquelle les Fitis les plus nordiques vont gagner leurs quartiers d’été et Europe boréale. Cette période de l’année est propice à l’écoute des chants, qui sont abondants, tant de la part des nicheurs que des migrateurs.

Polygynie

Certains Pouillots fitis mâles ont plusieurs épouses en même temps : on parle de polygynie facultative.

Effectifs, tendances et statut :

Monde (IUCN monde)

Le Pouillot fitis jouit du statut juridique d’espèce protégée. L’effectif total est estimé entre 56 et 100 millions de couples, mais une baisse de 29% a été observée entre 1980 et 2002.

En France (IUCN)

Sur la Liste rouge des oiseaux de France métropolitaine le Pouillot fitis est classé NT : espèce quasi menacée (espèce proche du seuil des espèces menacées ou qui pourrait être menacée si des mesures de conservation spécifiques n’étaient pas prises). Ses effectifs sont partout en diminution.

Les effectifs sur le sol français étaient estimés en 1991 par RAEVEL entre 2,5 et 4,5 millions de couples, mais une baisse de 51% entre 1989 et 2001, et une autre baisse de 20% entre 2002 et 2006, nous amènent à une estimation actuelle de 1 à 1,8 millions de couples (chiffres rapportés par la fiche projet du MEEDAT-MNHN). Cette baisse semble attribuable à la disparition progressive des taillis sous futaie. Une autre explication, secondaire, serait l’accroissement de l’urbanisation. On s’interroge sur l’influence du changement climatique, responsable de l’allongement du périple migratoire.

En Ile-de-France

Le déclin de la population en Île de France est encore plus marqué qu’en France : -58% en dix ans. On avance les raisons suivantes : déplacement vers de nord des zones de nidification à cause du changement climatique, imperméabilisation des sols, évolution de milieux arbustifs en zones forestières. Cette tendance s’observe aussi à Londres, Hambourg, Bruxelles.

La population nicheuse régionale est estimée à 6 000 - 7 500 couples. En 2010 on en comptait encore 10 000 à 20 000 ! On ne peut cependant pas (encore…) considérer le Pouillot fitis comme une espèce menacée, tant qu’il a la possibilité de décaler son aire de nidification vers le nord, et si on a la bonne idée de préserver voire restaurer son environnement préféré de taillis, bouquets de bouleaux, friches, zones ripisylves* accueillantes !… Il serait trop dommage, au printemps de ne plus entendre son joli chant…

Sur le Grand Paris, on compte moins d’une centaine de couples, surtout localisés dans la partie sud, plus boisée. On le trouve en lisière des forêts et des parcs.

Le saviez-vous ?

Mais d’où vient ce nom ? Sans doute de sa taille : Buffon avance que ce nom vient du latin pullus, désignant un oiseau très petit. Au XIIIe siècle le terme poillot servait à désigner le petit d'un oiseau. Il dériverait de l’ancien français poille :« poule ».

Bibliographie

Ouvrages

  • Paul Géroudet : Les Passereaux d’Europe, Delachaux et Niestlé, 2010
  • Atlas des oiseaux nicheurs d’Ile de France, éd. LPO (2017)
  • Atlas des oiseaux nicheurs du Grand Paris – 2015-2018, éd. LPO (2020)

Sites internet

Article de Christiane Deh

Fiche rédigée par les adhérents de la LPO Île-de-France