Oedicnème criard

Conseil Biodiversité

Un drôle d'oiseau

De corpulence moyenne, comparable à celle d'un pigeon, mais haut sur pattes, l'Oedicnème criard affiche un plumage brun clair strié de brun foncé sur le dos et blanc crème sur le ventre. C'est cette parure dorsale qui le rend indécelable lorsqu'il est couché à même le sol sur les cailloux ou parmi les mottes de terre. Ses ailes repliées sont pourvues d'une barre alaire blanche et d'un liseré noir qui, une fois déployées en vol, laissent voir une large zone blanche au niveau des couvertures et la pointe noire des rémiges.

Mais ce qui le caractérise plus surement sont ses grands yeux à l'iris jaune citron, adaptés à la vision nocturne et vespérale, un large sourcil blanc ainsi qu'une zone claire qui part du bec et vient souligner le pourtour oculaire, son bec jaune et noir, et ses hautes pattes jaunes et puissantes.

L'Oedicnème criard appartient à l'ordre des charadriiformes dont sont issus les limicoles (scolopacidae, burhinidae, recurvirostridae et hematopodidae), mais contrairement à leur comportement habituel il ne parcourt pas les zones humides à fouiller les limons vaseux pour se nourrir.

Oedicnème criard dessin

Oedicnème criard © dessin de François Desbordes / LPO IDF

Milieu sec et ouvert

Steppes, friches, landes, il préfère un environnement sec avec une végétation rase voire un sol caillouteux et aride. C'est un milieu où il se déplace rapidement au sol grâce à ses longues pattes qui lui donne une large vision périphérique permettant ainsi de contrôler toute incursion ou activité sur son territoire. Durant la période de nidification il se retire le plus loin possible de l'activité des hommes mais préfère toujours un espace bien dégagé.

Il ne dédaigne pas les grèves caillouteuses des rivières sauvages comme l'Allier, la Loire ou même la Seine ainsi que les bocages et les plaines cultivées où il se déplace au gré de l'évolution des cultures afin de toujours retrouver un milieu ouvert.

D'ordinaire discret et solitaire ou en couple pendant la période de nidification, on le retrouve souvent en groupe au début de l'automne dans les zones de grande culture où le couvert végétal est ras, juste après les moissons, au moment des rassemblements pré migratoires.

Oedicnème criard

Oedicnème criard © A. Bloquet / LPO IDF

Une vie dans la pénombre

L'Oedicnème criard reste très discret pendant la journée souvent terré sur le sol aride et caillouteux où son plumage lui permet de se fondre dans l'environnement. Immobile et parfaitement camouflé ou s'enfuyant à la moindre alerte durant la journée, il devient très actif lorsqu'il se met en quête de nourriture dès la tombée du jour jusqu'au lever du soleil.

Son régime alimentaire se constitue principalement d'invertébrés : vers de terre, mille pattes, coléoptères et particulièrement les bousiers.

C'est aussi au crépuscule qu'on peut entendre son long cri aigu, qui ressemble un peu à celui du Courlis cendré, repris par d'autres congénères dans le lointain.

A même le sol

Du fait de son activité principalement nocturne, sa parade nuptiale reste encore très peu connue. Il semble qu'elle se compose de courses poursuites et de positions démonstratives avec les ailes ouvertes et la queue déployée.

Le nid de l'Oedicnème criard est une simple dépression sur le sol réalisée par grattage, placée à découvert dans une zone caillouteuse à végétation basse et à faible distance d'un couvert.

La ponte intervient de mi avril à mi mai et se limite le plus souvent à deux oeufs grisâtres et tachetés de brun, ce qui les rend pratiquement invisibles sur le sol caillouteux.

L'incubation dure 25 à 27 jours et l'éclosion peut prendre un jour ou deux. Dès le premier jour l'oisillon quitte déjà le nid et accompagne ses géniteurs dans leur quête de nourriture. Il est déjà capable de courir à partir du deuxième ou du troisième jour mais il ne prendra son envol qu'un mois plus tard.

Oedicnème criard

Oedicnème criard © I, Paleixmart [CC BY-SA (http: http://creativecommons.org/licenses/by sa/3.0/)] / LPO IDF

Adepte d'un climat tempéré

L'Oedicnème criard est présent au sud de l’Europe, de l’Espagne à la Turquie et jusqu'à l’Ukraine mais reste un oiseau rare et sporadique dans le reste de l'Europe. On le trouve également dans les îles Canaries, en Afrique du Nord du Maroc à l'Egypte. Vers l'Est, sa distribution s'étend du Moyen Orient jusqu'en Asie du Sud est.

En France, on le rencontre localement dans les Hauts de France, le Centre Ouest, l'Auvergne, la Champagne, et surtout le long du contour méditerranéen du Languedoc Roussillon aux Bouches du Rhône notamment dans la plaine de la Crau.

Un oiseau méditerranéen

En période post-nuptiale, au début de l'automne, son comportement devient plus grégaire. Il n'est pas rare de le voir en groupe occuper les espaces enfin libérés dans les plaines cultivées, entre mi septembre et mi novembre, avant le départ pour ses quartiers d'hiver allant du sud de l'Espagne au nord de l'Afrique. C'est un hivernant rare en métropole sauf dans la zone à hiver doux (centre ouest et sud du pays).

Le retour de migration commence vers le 15 février et continue jusqu'à début avril

Oedicnème criard dessin

Oedicnème criard © Dessin de Léa Schlemmer / LPO IDF

Vulnérable

En Europe, l'espèce fait l'objet d'une préoccupation mineure sur la liste rouge de l'UICN depuis 2015. La chute des effectifs de la population européenne est estimée à 33% entre 1998 et 2016 mais serait due à de fortes variations interannuelles et non significative.

En France la population est estimée stable avec, à l'image de la situation européenne, de fortes variations interannuelles. Son statut est passé d'espèce quasi menacée à préoccupation mineure sur la liste rouge des oiseaux de France métropolitaine de 2016. Le pays comptait entre 7 000 et 10 000 couples sur la période 2000-2010.

Les principales menaces environnementales qui pèsent sur le maintien de l'espèce sont l’extension de la monoculture et son cortège de produits phytosanitaires, l'étalement urbain, la disparition des jachères, friches et landes , le dérangement humain, sans oublier la chasse dans les zones de rassemblement automnal. Cependant, des plans de conservation semblent porter leurs fruits et tendent à stabiliser la population, notamment dans les sites classés Natura 2000 et sur les territoires agricoles participant au programme PRAIRIE.

Le saviez-vous ?

Son cri ressemble tellement au cri du Courlis cendré qu'il est parfois appelé Courlis des pierres. Les anglo-saxons l'ont également surnommé Stone curlew bien que son nom commun soit Thick knees.

Bibliographie

Ouvrages

  • Paul Géroudet, Limicoles, gangas et pigeons d'Europe , Ed. Delachaux et Nestlé 2008, p 82-94
  • Nouvel Inventaire des Oiseaux de France , Delachaux et Nestlé Ed., p 188
  • Handbook of the Birds of the World Vol. 3 Hoatzin to Auks , Lynx Ed., p 348-363

Sites internet

Article de Jean-Pierre Van Wambeke / Fiche LPO Île-de-France