Grenouille rieuse

Conseil Biodiversité

La plus grande grenouille d'Europe ! Son tonitruant coassement laisse supposer qu'elle se moque de nous !

Grenouille rieuse © F. Ducordeau / LPO-IDF

Une géante dans sa catégorie !

La Grenouille rieuse est souvent confondue avec la Grenouille verte (dont elle se différencie par des sacs vocaux plus foncés) ou avec la grenouille de Lessona (plus petite et au chant différent).

Il s’agit d’une espèce de grande taille, certains individus dépassant les 130 mm. Les individus de taille supérieure à 100 mm sont presque toujours des femelles.

Elle possède un museau qui est assez pointu chez le jeune puis arrondi chez les individus plus âgés. Ses yeux, placés sur le dessus de la tête, sont assez rapprochés. Le tympan est bien distinct et il n'existe pas de tache temporale sombre à l'arrière de l’œil .

Le mâle possède 2 sacs vocaux de couleur grise sortant d'une fente à l'arrière des angles de la bouche.

La peau dorsale est lisse ou couverte de petites verrues, de coloration vert olive, brun-vert, très rarement vert d'herbe comme la grenouille de Lessona. Elle porte souvent des taches brun foncé ou une ligne verticale claire, a les flancs marbrés de noir ; les membres postérieurs sont gris clair, barrés de noir, à la face ventrale blanchâtre, tachée ou marbrée de gris sombre. Le membre postérieur est très long, la palmure importante.

Une espèce qui sait s’adapter aux variations météorologiques

Amphibien anoure, c’est-à-dire « sans queue » à l’état adulte, la Grenouille rieuse est un vertébré à la température interne variable, dépourvue d’écailles, de plumes ou de poils (dits “phanères”). Mondialement, ce groupe comprend environ 7000 espèces.

Dépendant de la température extérieure et afin de pouvoir réguler son organisme, la Grenouille rieuse passe la majeure partie de son temps dans l’eau ou à proximité : pour se rafraîchir en cas de chaleur mais aussi lors de période de grand froid. Elle hiberne dans de la vase au fond de l’eau (elle peut absorber l’oxygène de l’eau dont elle a besoin, au travers de sa peau perméable).

Son milieu de vie

Présente à moins de 1000 m d'altitude, elle fréquente les endroits à végétation riche.

Elle occupe de préférence les rivières, les étangs, les lacs, les fleuves et les milieux péri-fluviaux (les bras morts et les gravières), les lieux en amont d'estuaire. Continentale, elle est à la fois une grenouille terrestre et d’eau douce.

D’un appétit vorace, elle mange principalement des insectes (très présents au bord de l’eau), mais aussi des vers de terre, des mollusques, des petits reptiles et parfois aussi de petits amphibiens.

Mère d’une grande famille !

La Grenouille rieuse arrive à maturité après avoir subi 2 périodes d'hibernation.

La reproduction a lieu en avril ou mai. Lors de la ponte, un paquet d'œufs (jusqu'à 1200 œufs par femelle) est déposé entre les plantes aquatiques puis tombe au fond de l'eau. Cette grenouille pondant en plusieurs tas, ce sont donc jusqu’à 10 000 œufs par an qui peuvent éclore !

Les têtards dépassent parfois 10 cm et se métamorphosent après 3 à 4 mois de vie larvaire.

Migration et installation

Une étude a démontré que la Grenouille rieuse était impliquée dans des hybridations en Europe de l'Ouest (accouplement avec des grenouilles de type Lessona, de Perez et de Berger). Cela engendre nécessairement des confusions quant à l’identification de l’espèce.

Selon des statistiques douanières, des importations massives de différentes espèces de grenouilles vivantes destinées à la consommation, ont eu lieu en France dans les années 1970 (essentiellement depuis l’Albanie, l’Égypte et la Turquie). Ces importations ont représenté en moyenne 800 tonnes par an. Des lâchers accidentels ou délibérés ont eu lieu à la sortie des avions lors du chargement dans des camions, du fait de scientifiques, de restaurateurs ou de particuliers. Ils sont donc à l'origine de l'introduction de plusieurs espèces en différentes localités et donc notamment de la Grenouille rieuse.

Une “bonne vivante”

Cette plus grande grenouille d'Europe est connue pour ses larges cuisses mais aussi pour le coassement du mâle au printemps qui ressemble à un rire fort et saccadé !

En journée, la Grenouille rieuse vient à terre pendant quelques heures, dans la végétation au bord de l'eau (dans laquelle elle saute lorsqu'elle est dérangée).

Deux grenouilles rieuses

Grenouille rieuse © R. Clerc

Une espèce moyennement menacée

Selon l'UICN monde (Union internationale pour la conservation de la nature) :

Sa présence est mondiale (source GBIF) hormis dans les DOM-TOM et très concentrée en Europe.

En France, on la croise facilement mais l’espèce reste menacée. La préoccupation est mineure (espèce pour laquelle le risque de disparition est faible) car on la trouve nombreuse en différents lieux.

Un arrêté gouvernemental de 2021 interdit en France et en Europe la destruction de ses œufs, son dérangement, sa capture, sa détention, son transport, sa mise en vente et son utilisation à des fins commerciales ou non. La grenouille que l’on consomme de nos jours au menu des restaurants est une grenouille verte (issue de l’hybridation entre la Grenouille de Lessona et la Grenouille rieuse) ou une grenouille rousse d’élevage.

Répartition de la Grenouille rieuse dans le monde

Répartition de la Grenouille rieuse dans le monde (source : https://inpn.mnhn.fr)

En France (UICN)

Répartition actuelle en France métropolitaine

Répartition actuelle en France métropolitaine (source : https://inpn.mnhn.fr)

Dans nos régions

En Île-de-France

Sa présence est confirmée en Île-de-France. Si elle s’y reproduit avec ou sans hybridation, elle y est toutefois moins présente de nos jours que sur l'ensemble de l’Aquitaine où elle est majoritaire.

Elle est devenue une espèce dominante dans le Lot-et-Garonne et en Dordogne.

Grenouille rieuse dans l'herbe

Grenouille rieuse © C. Roussel

Son avenir…

La Grenouille rieuse, comme tout autre amphibien, appartient aux espèces les plus exposées au changement climatique.

Leur double vie (amphi : double – bios : vie ) les rend plus vulnérables à l'accroissement des températures et à la modification de l'humidité atmosphérique. S’ajoutent également de nouveaux dangers liés aux changements globaux : un nouvel agent pathogène “Batrachochytrium dendrobatidis” appelé aussi "chytride" qui n’épargne désormais aucune région de France, ni même les zones protégées, ainsi qu'un Ranavirus (localement).

Les pesticides ont également un impact majeur sur les amphibiens, du fait de l'absence de phanères et de leur peau très fine qui absorbe facilement ces particules. Quoiqu’en assez grand nombre, dite de plus en plus invasive, la Grenouille rieuse reste fragile.

Par ailleurs, les infrastructures de transport terrestres font courir des risques majeurs aux amphibiens : fragmentation (disparition, dégradation des espaces d’habitats favorables, extinction des petites populations) et mortalité directe par collisions. Divers dispositifs associés aux mesures « Éviter, Réduire, Compenser » (ERC) sont destinés à éviter l’impact ou le supprimer, atténuer ou réduire ces risques (exemple : la mise en place de passerelles, tunnels (“crapauducs”), panneaux d'interdiction aux véhicules lors de périodes de migration).

Bibliographie

Ouvrages

  • Gilbert Matz,Denise Weber 1999, Guide des amphibiens et reptiles d'Europe, Delachaux et niestlé
  • Ph.J.Dubois 2008, Le syndrome de la grenouille, Delachaux et niestlé
  • Lescure, J. & Massary de, J.-C. 2012
  • Atlas des Amphibiens et Reptiles de France. Biotope, Mèze & Muséum national d’Histoire naturelle, Paris. 272 pp.
  • Legros B. et al. 2016
  • Duguet, R. & Melki, F. 2003
  • Berger, 1966 et 1973 ; Dubois & Ohler 1995
  • Pagano et al., 1997
  • Pierre Joly, comm. pers., octobre 1995

Sites internet

Article de Carole Roussel

Fiche rédigée par les adhérents de la LPO Île-de-France