Piéride butinant un pied d'hysope © Nicolas Macaire / LPO

Piéride butinant un pied d'hysope © Nicolas Macaire / LPO

Le jardin est un espace aménagé où l’homme intervient au travers de plantations, parfois très structurées et ordonnées. Qu’elles soient sauvages ou cultivées, les plantes forment des entités toutes complémentaires les unes des autres. Les jardins Refuges LPO invitent la biodiversité à prendre place dans le parterre d’herbes hautes, de fleurs sauvages, dans les arbres, dans la mare... mais aussi dans les espaces destinés à produire légumes, fruits et herbes condimentaires. La petite faune sauvage bénéficie de ces espaces cultivés, qui, malgré leur statut d’espaces très gérés, ne sont pas incompatibles avec le Refuge. Nous nous intéressons ici au jardin des simples.

Qu'est-ce qu'un jardin des simples ?

Il s’agit d’un espace réservé à la culture des plantes médicinales appelées simples ou plantes officinales. Le jardin des simples fait référence aux jardins médiévaux, particulièrement développés par les moines autour des monastères, son nom latin est « herbularius » ou « hortus medicus ». En réalité, le jardin des simples contient également des plantes aromatiques et condimentaires comme le thym, la sauge, la mélisse et l'hysope.

Carré d'hysope officinale (Hyssopus officinalis) d'un jardin de simples © Nicolas Macaire / LPO

Carré d'hysope officinale (Hyssopus officinalis) d'un jardin de simples © Nicolas Macaire / LPO

 

Historique

La culture des simples a une très longue histoire qui remonte à la Mésopotamie (la première trace écrite de culture de plantes médicinales date de 1750 avant JC !)  et à l’empire romain, périodes où la pharmacopée végétale était très utilisée.

C’est sous Charlemagne (8e siècle) que le jardin des simples prend son essor. En effet, Charlemagne ordonne en l’an 812 la rédaction d’un acte de 120 articles, le Capitulaire de Villis, regroupant le savoir-faire des médecins et des moines de l’antiquité. Le Capitulaire de Villis, ou plus exactement Capitulare de Villis vel curtis imperii, est un acte législatif dans lequel on trouvait la liste d'une centaine de plantes, d’herbes, d’arbres et d’arbustes dont la culture était obligatoire et ordonnée dans les jardins du domaine royal pour leurs vertus culinaires, condimentaires et médicinales.

Capitulaire de Villis / Wikipedia

Capitulaire de Villis / Wikipedia

Au Moyen Âge, les moines se conforment donc à ces règles et s'organisent pour que leurs jardins soient efficaces et productifs. Le jardin de monastère prend une fonction pratique (potager, plantes médicinales) mais aussi une dimension symbolique, voire mystique.

Anciennement, les allées du jardin reprenaient la forme de la croix latine et tout faisait référence au divin, avec au cœur du jardin une fontaine et les fleurs les plus sacrées comme la rose et le lys.

Le jardin des simples ne doit cependant pas être confondu avec le jardin de curé, qui est un jardin adjacent à une église ou un presbytère, ayant vocation à nourrir quelques personnes. Le jardin de curé est avant tout un jardin potager et d’arbres fruitiers, pouvant comporter quelques plantes médicinales.

Aujourd’hui les jardins des simples subsistent toujours, aussi bien chez les particuliers que dans les jardins partagés des communes ou encore dans des jardins remarquables, tels que le Jardin Carolingien de Melle (79) ou le jardin médiéval de l’Abbaye de Valloires (80).

Chenille de piéride sur une capsule de coquelicot © J.-J. Carlier

Chenille de piéride sur une capsule de coquelicot © J.-J. Carlier

Structure des jardins de simples

Le jardin des simples est un jardin conçu en carrés. Il est généralement clos de murs ou de haies. Les carrés ont idéalement la dimension de 1,20 mètre de côté, ce qui permet d’atteindre le centre du carré sans mettre le pied dans la parcelle.

Chaque carré est délimité par du plessis (environ 30 cm de hauteur). Le plessis est formé de branches de noisetier, de châtaignier, de saule ou d’aulne tressées et maintenues par des piquets en bois imputrescibles. Le châtaignier étant l’essence qui résiste le mieux au temps.

Les carrés sont remplis d’un mélange de terre et de compost et chaque plant est recouvert d’un paillis, essentiel au maintien de l’humidité du sol, et qui évite également la pousse des herbes non désirées. Les carrés peuvent aussi parfois comporter des petites bordures de buis qui représente l’immortalité.

Les carrés permettent de classer et regrouper les plantes en fonction de leurs propriétés médicinales : plantes diurétiques, digestives, analgésiques, sédatives...

Le jardin des simples est un jardin en carré © Nicolas Macaire / LPO

Le jardin des simples est un jardin en carré © Nicolas Macaire / LPO

Les simples, un atout pour la biodiversité

Les plantes médicinales sont particulièrement mellifères et très attractives pour les insectes butineurs. Bourdons, abeilles sauvages, syrphes, coléoptères, papillons diurnes et nocturnes y jouent le rôle de pollinisateurs. Certaines plantes constituent le support nourricier des chenilles de papillon (plantes hôtes) comme le fenouil qui attire la magnifique chenille du machaon.

Ces plantes sont également intéressantes en association au potager en limitant les ravageurs. L’exemple type est celui du souci, une plante aux nombreuses vertus médicinales qui est également anti-nématodes, intéressante en association avec les tomates, poireaux, ails, oignons et fraisiers.

Osmie butinant des fleurs de moutarde blanche (Sinapis alba) © Nicolas Macaire / LPO

Osmie butinant des fleurs de moutarde blanche (Sinapis alba) © Nicolas Macaire / LPO

Quelles plantes trouve-t-on dans un jardin de simples ?

Il s’agit de plantes utilisées à des fins médicinales et condimentaires, faciles à cultiver, peu exigeantes et qui résistent bien aux parasites. Elles sont particulièrement attractives pour la biodiversité en offrant des supports aux insectes auxiliaires et pollinisateurs.

11 plantes médicinales faciles à cultiver

Si vous souhaitez débuter un carré de simples, voici une sélection de 11 plantes de culture facile, particulièrement attractives pour les insectes butineurs. Leur caractère nourricier les rend intéressantes pour accroître la biodiversité du jardin.

Plante médicinaleCaractéristiquesRôles dans la pharmacopée médiévale
Camomille romaine doubleParfumée, excellente plante couvre-sol.Propriétés digestives, antistress, apaise le sommeil.
Fenouil sauvageTrès intéressant pour les insectes, mellifère, tiges creuses en fin de saison.Graines facilitent les problèmes de transit. Diurétique et digestive.
GuimauveMellifèreContre les maux de gorge, toux. Plante adoucissante.
Hysope officinaleMéditerranéenne, des milieux secs et rocailleux. Très mellifère.Anti-infectieuse (virus, bactérie). Agit contre les maladies des bronches.
Menthe poivréeHybride entre la menthe aquatique et la menthe verte. Contient une plus forte concentration de menthol. Mellifère.Tonique et apaisante. Stimule l'organisme et facilite la digestion.
Mélisse citronnelleTrès mellifère, plante couvre-sol.Régule les hormones dans l'organisme.
RomarinPlante aromatique, de terrains secs. Mellifère avec une floraison hivernale. Plante anti parasitaire.Plante stimulante de l'organisme, intéressante pour les reins et le foie (digestion des graisses) et antistress.
Sauge officinaleAdaptée aux terrains secs.Antiseptique, antifongique, régulatrice du cycle menstruel.
SouciIntéressante en association au potager comme plante répulsive. Activatrice de compost.Propriétés cicatrisantes (irritation d'estomac, d'intestin) et de la peau.
Thym communMéditerranéen, des terrains secs. Aromatique et mellifère.Digestif, antiseptique, contre les affections des voies respiratoires.
Verveine citronnelleFeuilles parfumées au goût de citron, culinaire et mellifère.Digestive, apaisante.

 

En guise de conclusion

En diversifiant votre jardin et en ajoutant des plantes mellifères aux espèces végétales indigènes déjà préservées, vous augmenterez l’accueil de la petite faune sauvage, tout particulièrement des insectes.

Un carré (patch) de simples est un excellent compromis pour qui veut attirer les insectes sur un petit espace : cour, terrasse, balcon… et de telles espèces ont toute leur place dans un Refuge LPO sur votre balcon. Au-delà du caractère usuel, les simples apportent un visuel intéressant, des parfums merveilleux, et surtout une grande diversité d’espèces d’insectes, y compris en ville.

Nous vous encourageons à suivre la règle médiévale, et à réaliser vos plantations de plantes aromatiques, odorantes et accueillantes !

dernière mise à jour : 16 février 2024